Georges CARPENTIER est né à Liévin le 12 janvier 1894. Il commence son parcours de boxeur en pratiquant la boxe française. En 1907, à l’âge de 13 ans, il est champion de France junior de boxe française. Après avoir commencé la boxe anglaise à l’âge de 14 ans en 1908 (et déjà champion du monde amateur le 4 décembre), il devient champion de France des welters en 1911 à 17 ans, puis d’Europe le 23 octobre de la même année à Londres. Le titre européen des poids moyens tombe dans son escarcelle le 29 février 1912 à Monte-Carlo, et celui toutes catégories (lourds) le 1er juin 1913 à Gand. Pendant la Première Guerre mondiale, il sert dans l’armée de l’air et reçoit la Croix de guerre et la Médaille militaire. Il se blesse au bout de 18 mois et réintègre la vie civile où il reprend sa carrière de boxeur.
C’est à cette période qu’il connaît sa courte carrière de rugbyman pratiquant, licencié au SCUF, et disputant le Championnat 1918-19.
Dès le 11 novembre 1918, Georges Carpentier est affecté comme moniteur à L’École de Joinville. Il n’a pas disputé de combat de boxe officiel depuis 4 ans. Ces quatre années auront probablement coûté à la gloire du sport français un titre de champion du monde de boxe toutes catégories dû au talent exceptionnel d’un mi-lourd léger, presque un poids moyen… On évoquera souvent pour Carpentier le souvenir de ce phénomène que fut Bob Fitzimmons, triple champion du monde moyens, mi-lourds et lourds.
Charles Pagnoud, admirateur et ami de Georges Carpentier depuis l’avant guerre, équipier premier de Rugby du SCUF au surplus, s’est mis en tête de faire tâter de l’ovale au grand boxeur. Il va chercher Georges à Joinville et l’amène au SCUF. Et Carpentier accepte…
Athlète doué, sprinter de valeur, Georges devint vite le 3/4 aile droit titulaire en Équipe première. Charles Brennus et Frantz Reichel le chaperonnent. André Theuriet et Lucien Besset le conseillent. Il n’y a plus qu’à le licencier. Le Comité de Paris, un instant, s’oppose à ce que ce professionnel puisse officiellement pratiquer. C’est la Rugby Union d’Angleterre qui fait connaître son avis favorable par Brennus et Reichel, anglophiles estimés outre manche. La Rugby Union considère que Carpentier, professionnel de Boxe et véritable idole du ring à Londres, a l’esprit de pur désintéressement qui est de bon ton en matière de ballon ovale. Voilà donc Georges licencié pour le SCUF… Les bulletins du SCUF de 1919 relatent les exploits de Carpentier rugbyman. On évoque même une possible sélection pour le match Paris / Londres, voire même pour le XV national, mais pour ce boxeur professionnel si notoire, c’est gênant ! Bref, comme tout ça traîne, Carpentier et ses amis jouent au Rugby et c’est là l’essentiel.
La saison 1918-19 s’achève et la Boxe est là, qui appelle notre champion. Et ce champion veut mettre les bouchées doubles, rattraper ces 4 années perdues pour le Sport. Le 4 décembre 1919, Carpentier culbute en un round l’anglais Joe Beckett, conservant ainsi son titre de champion d’Europe des poids lourds. Le 7 décembre, il est à Paris et juge la touche du match joué par le SCUF à Colombes.
Le 18 decembre 1919, il est fait membre d’Honneur du SCUF à l’issue d’un dîner offert par le SCUF dans les salons du « Grand Teddy » à Georges et à son manager François Descamps. C’est un dîner de 40 couverts. Parmi les convives : E.G. Drigny, Berneron, Frantz Reichel, Henri Decoin, Georges Bruni, Alfred Eluere, Lucien Besset, Gaston Benac, entre autres célébrités. Ce dîner est en fait un dîner d’adieux au rugby officiel. Car si Georges rechausse quelquefois les crampons, c’est en match amical, sans forcer et sans risques, car sa carrière de boxeur continue.
Sa carrière ira, malgré l’échec Dempsey, jusqu’au bout des possibilité d’un champion hors du commun, confronté trop tard par le destin avec des tâches faites pour un homme physiquement plus frais.
Il participe à des réunions d’anciens et Pagnoud est toujours là pour entretenir le contact. C’est en 1955 que Pagnoud nous l’amène pour donner le coup d’envoi du match de Rugby du soixantenaire du SCUF, au stade Jean Bouin, contre une sélection Piémontaise. En 1961 à l’occasion de la remise de la médaille d’Or 1960 du SCUF à Suzanne Chapelle, un brillant dîner réunit à nouveau à Chazelles, Georges Carpentier avec Henri Decoin, Georges Bruni, Lucien Besset, Jean Semmartin, Albert Mayaud… Au cour des dernières années de sa vie, la Boxe, le Rugby international ou la simple amitié étaient des occasions de rencontre avec le Docteur Jean Martin. Il avait prévu d’être présent à la célébration des 80 ans du SCUF. Le Destin ne l’a pas voulu ainsi…
28 octobre 1975 à Paris — La nouvelle éclate telle une bombe : Carpentier est mort ! Il était donc mortel l’homme pour lequel en 1921, à l’annonce de son échec devant Jack Dempsey « on avait pleuré dans les chaumières » !
La foule qui se pressait devant l’Église de la Madeleine, le 29 octobre, représentait un échantillon de la France en deuil. Ils étaient tous là, ses amis connus et inconnus : les humbles, les riches, les notoires, les petits, les vedettes de l’art, du sport, de la politique, les militaires et les civils… A l’occasion de la fin de la grande épopée que fût la vie de Georges Carpentier, tout aura été évoqué, tout sauf sa courte carrière de rugbyman pratiquant, licencié au SCUF, et disputant le Championnat 1918-19.
Ce reportage sur Georges Carpentier, rugbyman et scufiste, ravive, comme s’il en était besoin, la flamme du souvenir. C’est une flamme qui ne vacillera jamais pour les sportifs de France, Georges Carpentier, Champion immortel.
Aujourd’hui, son nom est associé au Complexe sportif du XIIIème arrondissement de Paris (la Halle Georges Carpentier), où les différentes catégories des rugbymans du SCUF ont évolués durant une trentaine d’année avant de rejoindre le 17ème arrondissement dans les années 2010.
En résumé
- 109 combats de boxe anglaise, dont 88 victoires, 6 nuls et 15 défaites.
- Il a été élu au Boxing Hall of Fame en 1964.
- Un film muet, Le Roman de Carpentier, sort en 1913. Il présente une version romancée de sa carrière.
- Le 5 janvier 1965, Carpentier est nommé président d’honneur du Comité national de boxe française (CNBF) nouvellement créé.
Ce portrait s’appuie sur la rédaction faite par le Dr Jean Martin dans la revue « Sporting » n°3 de 1977