Quelques années auparavant les maillots au Scuf étaient payants. En effet seule l’équipe première bénéficiait d’un jeu de maillots « Noir et Blanc » et un jeu de remplacement de couleur jaune.
Les autres équipes n’avaient pas de jeu de maillots, chaque joueur se payait le maillot, les chaussettes, le flottant et payait une cotisation au Club. Chacun était fier de présenter sa carte Scuf et bénéficier de la réduction de 10 % lors de l’achat chez Claude Maydieu, magasin de sports, rue Claude Bernard, et qui fournissait tous les rugbymen parisiens. Il est à noter que les maillots de l’équipe fanion étaient lavés et rapiécés par Mme Martin et pour les autres chacun avait en charge son maillot, autant dire que les équipes scufistes se présentaient le plus souvent en tenues disparates.
Une grande sympathie entourait le Club « Noir et Blanc » le Docteur Martin était une personnalité du sport, président de la commission médicale de la FFR et médecin de l’équipe de France. Il avait l’estime et la confiance des tricolores, il les couvait et avait une certaine influence. La FFR était présidée par R Crabos et le chef des sélectionneurs était Roger Lerou (RCF) , le Cifr dirigée par Serge Saulnier (Stade Français), de fortes personnalités.
Le rugby, sport de copains de bandits, vivait très bien, sous le régime de l’amateurisme marron, idéalement fait pour lui, et pour cette solidarité sans tapage qu’il préconisait entre les anciens du club et ses petits derniers et que dans les sociétés méridionales, les gendarmes se lèvent tard. Que de dérogations ! Il faut dire que les Britanniques étaient très sourcilleux sur les entorses présumées de l’amateurisme et nous n’étions qu’invités au Tournoi des 5 Nations.
Nous étions nourris de la lecture du livre de Denis Lalanne « Le grand combat du QUINZE de FRANCE » , les joueurs étaient devenus des exemples, des modèles, ils n’étaient pas des saints mais Lucien Mias, Jean Prat François Moncla, Michel Crauste, André Boniface…etc. étaient des seigneurs, des foutus caractères Jean Prat, par les Britanniques avait été baptisé » Mr Rugby », il forçait le respect sur le terrain se comportant en vrai gentleman par les beaux samedis du Tournoi.
Le Scuf fréquentait ce beau monde, il était un des rares clubs français à accompagner l’équipe de France lors des Tournois, on jouait contre une équipe locale le Samedi matin et on assistait au match international l’après-midi et agapes le soir tout cela grâce au Docteur Martin. En Irlande nous jouâmes contre Blackrock collège, en Ecosse Lasswade RFC, au Pays de Galles, Porthcawl Rfc et ainsi faire la découverte des terrains mythiques de Landsowne Road, de Murrayfield, de l’Arms Parck et de Twichenham. Que de beaux souvenirs, en dépit de finances étroites nous marquions notre différence avec les autres clubs. Mais lesTricolores connaissaient le SCUF car le Docteur ne tarissait pas d’éloges sur ses enfants scufistes et leur pur amateurisme. Aussi lors de France – Italie à Agen en 1957, les français jouaient en jaune contre « l’équipe azzura ». A la fin du match il n’y eut pas d’échange de maillots entre les joueurs. François Moncla, le capitaine des bleus, les rassembla et les offrit au « Toubib » pour son cher club…
Et depuis ce temps, le SCUF eut deux jeux de maillots pour la première, ils étaient solides et durèrent une dizaine d’années jusqu’en 1971. Pour la petite histoire les maillots conservaient l’empreinte du coq, Mme Martin ayant décousu l’écusson. A chacun de rêver !
C’est en 1967, lors de la prise de la présidence par les rénovateurs et du Président Bernard Jodelet que toutes les équipes du SCUF bénéficièrent d’un jeu de maillots chacune et du lavage assuré par le club, tout en ayant un budget équilibré…
Nous sommes restés de vieux gamins, on s’inscrivait dans l’histoire scufiste, fou amoureux de notre club, fou du stade et simplement fou d’exister …Ensemble…
Scufistement.
Jean Hospital