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Jean-Michel GUIGNARD

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– Ta carrière rugby ?

C’est une très longue histoire qui débute en 81… Avec quelques potes, équipe du lycée Jacques Decour au niveau cadet. On finit champion de Paris scolaire : mon seul titre ( ! ) en 26 ans.

On part tous prolonger notre apprentissage rugbystique au SCUF niveau cadet 2, aiguillé par notre coach du lycée.

C’est en junior que nous faisons la rencontre décisive : l’icône, le grand maître, le guide : Jean-Pierre Petitet ! Nous lui devons beaucoup ! Il représente l’esprit même du SCUF : l’amour de ce jeu, le goût de l’engagement total, la capacité à gérer avec sourire, flegme et intelligence les milliers de galères scufistes ; et, tout ça sans jamais se prendre au sérieux, et, chose incroyable, sans jamais avoir roulé au pied d’un comptoir… Ce n’est certainement pas le plus grand technicien [à part pour le placage obus dans les genoux ), mais des générations de scufistes lui doivent des souvenirs impérissables.

Donc, en junior, Crabos à l’époque, nous perdons plus souvent que le contraire mais nous nous forgeons un esprit de corps indestructible à l’image de notre mentor : du moment qu’on s’échappait pas au placage, il était satisfait… Je jouais avec les Bejanin brothers ( Jerome et Olivier), François Lormeau, Thierry Massy, puis avec Fred Laplaze qui s’était « perdu » à l’ASPP… J’étais arrivé centre du lycée, mais, ayant toujours préféré le cadrage poussé au débordement, je passais devant.

J’ai plus de mal à faire l’historique de mes années senior ; de 20 à 36 ans, ça en fait des batailles… 16 ans de fidélité, excepté 2 ans de coopération en Tunisie où j’eus toutefois le bonheur d’exploser la mâchoire d’un « ennemi » de la folklo du PUC en tournée dans le coin ( pas avec une bouffe, chose qui me répugne car c’est un aveu de faiblesse voir de connerie, mais d’un bon nettoyage régulier au casque… ).
Donc, 16 ans en 3ème div, en honneur, en promotion d’honneur, en 3 jeunes avec des dizaines d’entraineurs tels Pouliquen ou Bonthoux version jeunot, à Pouchet, à la Cipale, à Pershing, à Fontainebleau, à Reims ou dans d’improbables dimanches à Gravenchon, Verdun, Vierzon ou Nuits Saint Georges ; mais, surtout des centaines de moments de partage avec les mecs simples et pas cons que notre chère auberge espagnole du SCUF semble attirer.

Vu mes qualités rugbystiques limitées, j’ai rarement joué en première à part deux années sous l’ère Pouliquen avec mon frère d’armes Olivier Bejanin à la mélée, mais j’ai toujours pris un plaisir infini à donner mon corps au club quel que soit le niveau ( ma tête aussi à l’époque où l’on aimait pas les talonnages trop audacieux ! ).

Puis, à 36 ans, après des années de jeudis glauques dans la boue putride et nauséabonde de Pouchet ( ! ), j’ai répondu à l’appel de Jerôme Bejannin à le rejoindre dans la confrérie glorieuse des Vieux Cochons où la condition physique est laissée à l’appréciation personnelle du porcin.

J’y attend depuis avec plaisir et enthousiasme le couteau du boucher des espérances rugbystiques…

– Comment expliques tu ta longévité dans ce sport ?

Cela ne s’explique pas ! J’ai passé ma vie à me rouler dans la fange et à remuer de la viande chaque week-end. Une semaine sans combattre est une semaine incomplète voire inutile !

J’aime aussi cette communion autour d’un même objectif futile donc indispensable. Retrouver les potes des Vieux Cochons chaque samedi, se dépouiller ensemble et deviser autour d’une mousse réparatrice, c’est inestimable.

Pourtant, j’ai mille raisons d’arrêter : j’habite à 50 kms de Paris, j’ai la charge de mes deux bambins, je bosse comme un âne pour mon boulot et, surtout, je loupe toujours les promos week-end d’IKEA.

D’ailleurs, j’ai arrêté une saison il y a deux ans, à cause d’un genou récalcitrant et pensant que mon heure était passée. Mais, j’étais invivable et les week-ends étaient une souffrance.

Donc, maintenant, carpe rugbyem : je donne tout ce que je peux, et nos vétérans hyperactifs, Manu Enriquez et Corbier me donnent l’illusion d’avoir encore un avenir sur le pré.

Enfin, je me réjouis de jouer encore au côté d’Olivier Bejanin et Fred Laplaze qui étaient déjà avec moi au lycée en 81… Et de voir JP Petitet de temps en temps derrière la main courante…

 


– Aujourd’hui as tu encore un petit regard sur les résultats de l’équipe 1 du SCUF ?

Bien sûr, et j’en rends grâce à François Guillermet avec sa livraison du dimanche soir : c’est plus complet qu’une ligne dans le jaune…

Vu mes charges et mes aventures du samedi, j’ai rarement été les voir jouer. Néanmoins, l’inconstance et les lacunes techniques qui semblent se perpétuer me laissent espérer du SCUF de toujours !

 

– Le rugby du temps où tu as commencé à jouer et aujourd’hui, il y a 2 mondes. Tu as su t’adapter ou tu gardes les principes de l’époque pour jouer ?

Putain, j’ai commencé il y a si longtemps ? Les ballons n’étaient pourtant plus des vessies de porcs farcies et j’ai jamais vu Lucien Mias à Colombes !

Bon, ce qui est vrai, c’est qu’avant, au sol, c’était la guerre et en l’air c’était le bordel. En mêlée, le talon était une cible : heureusement, j’ai un gros pif protecteur et j’ai toujours considéré que les tireurs y perdaient leur lucidité : quand tu ouvres la boîte à gifles, tu y perds ton rugby ; il y a tellement d’autres occasions légales de châtier tes adversaires…

Bref, même si le rugby d’antan avait ses charmes guerriers, j’ai appris à ne plus jeter mon crâne inconsidérément dans les rucks ( de mon temps, ça s’appelait des regroupements, voir des empilages… ). Je reconstitue avec obéissance le rideau défensif…

De même, depuis les lifts en touche, je me sens plus responsable de leur réussite ; avant, le lancer était aussi aléatoire que l’impulsion des sauteurs.

Par contre, il reste les incontournables. L’agressivité offensive et défensive, la volonté de ne rien lâcher quel que soit le score et l’amour de ton coéquipier. Sur un terrain de rugby, il n’y a que quatre cerveaux : le 8, le 9, le 10 et le 15. Les autres doivent surtout avoir du cœur et des couilles !

 

– Tes grands souvenirs scufistes c’est avec la 3 Vieux ou tu en as d’avant à nous faire partager ?

Heureusement mes grands moments ont commencé avant les VC ! Tout d’abord, comme je l’ai déjà dit, tous les matchs de cadets et de juniors : les dimanches matins où l’on se retrouvait l’œil vitreux et le regard hagard après une boum d’ados bourrés.

La finale Toulon-Toulouse en 85 où l’on remettait le Bouclier avec François Lormeau : la finale du siècle au bord de la pelouse. Inoubliable.

Les déplacements en 3ème div avec le très regretté La Gaufre au micro du bus. On partait à 5h du mat, on revenait complètement imbibé à 1h du mat et le président devait trouver une nouvelle compagnie de cars…

Strattford upon Avon, of course !

Les jeudis et le dimanches soir boulevard Morland avec l’irremplaçable Daniel Bourrel derrière le comptoir : ça durait jusqu’au bout de la nuit.

L’essai de la descente à Fontainebleau. Mythique ! En plus, sur le chemin, je détruis ma voiture dans un carambolage sur l’A6. Je descends à Fontainebleau pour assister au moins au maintien du club dans ce match de la dernière chance. Et, là, tout au bout d’un match merdeux que nous menons de 2 points… Je laisse la tradition orale relater les faits aux plus jeunes…

Une victoire 7 à 3 avec la 3 jeunes contre le Métro ; c’était David contre Goliath ! On a défendu comme des morpions et on marque sur un seul contre. Epuisant et jouissif.

Enfin, plein de matchs avec les Vieux Cochons ! Et les homériques tournées porcines !

Et, puis bien sûr, encore quelques dizaines d’années de grands moments rugbystiques pour moi… En tout cas, l’évolution actuelle des VC me laisse plein d’espoirs. Sous l’impulsion de l’ancien président Jérôme Bejannin et du nouveau Fabrice Mirjol, nous tournons avec de nombreux nouveaux joueurs qui sont venus apporter leur enthousiasme et leurs jambes. D’ailleurs, allez suivre nos aventures sur notre blog :

http://lesvieuxcochons.blogspot.com/

– En dehors des Vieux cochons as tu gardé des contacts avec d’anciens joueurs ?

Malheureusement, très peu ! Il faut dire qu’il y en a peu avec qui j’ai joué ! Néanmoins, je suis toujours ravi de croiser les Schwartz brothers ainsi que le father qui a donné sa vie au club, en plus de ses deux fils, celui qui tchache et celui qui plaque. Et bien sûr le président Lionel.

Oh, mince, j’ai rien compris à la question : je parle de joueurs actuels au lieu d’anciens !

Tant pis, tout le monde deviendra bientôt un ancien joueur comme moi. Mais personne ne nous aura volé notre jeunesse !

 

– Quel est le principal conseil de grognard que tu pourrais donner aux jeunes qui débarquent au SCUF ?

J’aimerais juste que les jeunes scufistes profitent autant que moi de leurs aventures rugbystiques.

Pour cela, il suffit juste de remettre les choses à leur place !

Le rugby n’est le métier de personne.

On s’emmerde suffisamment la semaine pour ne pas le faire le week-end.

On ne s’entraîne pas l’hiver sous la pluie glaciale pour être performant comme l’exige notre gonflante société libérale ( c’estm on côté marxiste, encore un vieux truc disparu… ) mais pour ne pas décevoir nos 14 potes et les regarder dans les yeux.

Il n’y a ni honte à perdre, ni gloire à gagner : il y a juste du plaisir à partager.

 

Jeune scufiste qui t’entraîne sur la moquette de Pouchet, n’oublie jamais les centaines d’anciens qui ont poussé dans la boue fétide et rugueuse de cette ancienne décharge. Une pensée spéciale à Christophe Nivoix qui est revenu gambader sur les prés après avoir vaincu une sale tumeur au cerveau : voilà un vrai guerrier !

Bises reconnaissantes à tous ceux avec qui j’ai partagé.

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Qu’est ce qu’il devient ?

La saison 2008 se termine en beauté. Il est Capitaine et remporte la Coupe des Clubs du Samedi IdF. Son second titre 27 ans après !

En 2009-10, à 44ans, il est toujours au club et on le retrouve dans l’effectif de l’Equipe Réserve pour dépanner ! Et bien sur, toujours présent avec l’Equipe 3.

En 2012 il devient responsable de la 3 Vieux Cochons. Et en 2013 il gagne à Stratford contre les Olds Legends 12-10, quelle victoire !  Il est à l’initiative de la tournée des « Gorets » qui se déroulera en avril 2014 à Cork en Irlande. Il arrive au terme de sa présidence des Vieux Cochons, et au terme d’une carrière en noir et blanc. Installé assez loin en banlieue parisienne, pour ne pas dire à la campagne, on ne le voit plus beaucoup au sein du club.

 

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