Un géant……..de générosité.
Jean Cormier a replié son parapluie, il est parti ce 17 Décembre à 16h, il avait 75 ans (1943_2018). C’est une histoire, un roman, une vie bercée de générosité et de fidélité en amitié.
Grand reporter au Parisien, il avait un statut spécial et bénéficiait de la confiance de la famille Amaury. Il parcourut le monde, connu tous les terrains de France. Le rugby, sports de copains, de bandits vivait très bien sous le régime de l’amateurisme, idéalement fait pour lui, pour cette solidarité sans tapage qu’il préconisait entre les anciens du club et ses petits derniers, Jean Cormier affectionnait particulièrement cette fraternité, il avait l’estime des joueurs, des petits aux plus grands.
Je l’avais connu lors du match Galles – France en Mars 1968 à Cardiff et on avait sympathisé tout de suite, le renom du Docteur Martin faisait beaucoup , et le Scuf en bénéficiait, puis ce fut les 3 journées telluriques à Paris pour célébrer le grand Chelem de Christian Carrere chez l’ami Tony, rue Princesse. « Les verres de contact » étaient établis et nous ne cessâmes de les faire trinquer pendant 50 ans.
Ecrivain, défenseur de la forêt amazonienne, admirateur du Che Guevara et surtout disciple d’Antoine Blondin » il ne cessait d’écrire et de vivre pleinement. De nombreux bouquins: La biographie du Che, le curé de Soweto, le livre d’Or du rugby avec Pierre Albaladejo. Jean Cormier écrivait « Ma chance est d’avoir tutoyé le rêve, d’avoir vécu près d’un homme prénommé Antoine qui, lui, a vécu dans le génie de l’homme de lettres nommé Blondin. »
Humaniste et seigneur , toute sa vie aura une direction selon A Blondin « L’amitié aura été mon manteau » et chaque jour, chaque nuit il appliquait ce principe. Son royaume, Saint-Germain des prés, et par chance ou
malchance le Puc et le Scuf sévissaient en ce domaine et comme disait le puciste Joël Fénart « l’ordre universitaire régnait sur la rive gauche «. Rien ne nous arrêtait, on se rendait du Flore à la Grille, en passant par le
Monteverdi de Claudio, les Charpentiers, le Vagenende des Egurreguy, le Old Navy de Michel Plante, l’immanquable Chay de l’abbaye, puis un apéro Chez Georges rue des Canettes, et aussi la Télé rue Guissarde.
Quand la forme était là on traversait le fleuve le boulevard Saint-Germain pour atteindre la Rhumerie et après les îles les soirées, le Sunny Side, de Tony le Marmandais aux grosses moustaches , les nuits se prolongeaient
fort tard , toute l’Ovalie était présente et agitée avec les internationaux, les artistes, les Vip germano-pratins, le mélange se réalisait pour notre plus grand bonheur et celui de Jean, nommé « Corme des brumes « .
Il aimait le Scuf et les scufistes, ses valeurs, son histoire, comme d’ailleurs le Puc et les pucistes de R Blachon. Je pense qu’il avait un ventricule violet et un ventricule Noir et Blanc, et son coeur n’a jamais cessé de battre pour
nous.
Le Scuf avait des liens solides et suivies avec la presse, il bénéficiait d’appuis et nos amis journalistes ne firent jamais défaut J-J Simmler, F Delteral, D., Lalanne, les frères Vierne, J.Verdier ……et Jean Cormier. Les pages du Midol, de l’Equipe, du Parisien nous étaient ouvertes et nous dégainions facilement en cas de litiges avec la FFR ou le Cifr. Belle époque où la fraternité nous unissait d’autant plus que le Marathon des leveurs de coude naquit en 1987, ce carnaval des rues si intense et au succès grandissant allait réunir tous les amis de Jeannot dans une ambiance chaude et gouleyante, l’équipe du Scuf bien emmenée par Wladimir Hagondokoff a toujours été tonitruante… Etant trésorier de l’organisation j’ai pu me rendre compte de la force de son carnet noir qui ouvrait toutes les portes au nom de l’amitié, du partage, de la fraternité, on ne pouvait dire non à Jean Cormier…..
Puis il nous aida à organiser le trophée Simmler qui eut lieu 10 fois et à chaque fois il conviait des personnalités, R UNDERWOOD, J.TAYLOR, D,ROBIN ,J_B LAFOND ……., ce fut toujours un succès et les gamins étaient ravis.
Il nous appuya pour les 110 ans du Scuf, obtenant une subvention du Président Lapasset et en plus un bel article pleine page dans « Le Parisien », je lui dois beaucoup pour le lancement de mon livre dans les salons RICARD, rue royale ainsi qu’à son fidèle Frédéric Brandon, peintre.
Grace à Jean Cormier, nous sommes restés de vieux gamins, à l’amitié des verres de contact mais unis par le coeur généreux de l’un et si communicatif et nous étions fous comme lui, fous par quelque manière , fous amoureux, et simplement fous d’exister, fous chantant, fous du stade. Le diner du dimanche soir à la Grille la table se vide alors que la haut la table d’hôtes se remplit, un peu trop ces temps ci. A la suite de cette lecture, où les copains sont partis devant, on va me croire perdu de nostalgie quand il ne s’agit que de gratitude envers celui qui a enchanté mon voyage dans un demi-siècle et plus de bohème sportive et d’amitié. Du haut de mes années maintenant crépusculaires, je peux mesurer le temps passé et le vide laissé. Mes yeux s’embuent, et les larmes s’écoulent au départ d’un garçon exceptionnel et pour terminer ; « Entre deux mots, le journaliste sportif ne choisit jamais le moindre »
ADIOS .